Le Cotentin de Barbey d'Aurevilly est une terre de contrastes qui s'anime au gré des caprices d'une nature romantique imprègnant jusqu'aux comportements humains tant les personnages qui hantent les pages de ses romans et nouvelles semblent être façonnés, sculptés et habités par leur environnement omniprésent.
Le style remarquable et imagé de Barbey d'Aurevilly traverse toutes les nuances du noir et du blanc, balafrant la lumière de hachures puissantes pour l'aider à se révéler à la manière des illustrateurs et graveurs du 19ème siècle.
Un univers entre chien et loup, toujours à la frontière du bien et du mal et qui n'est pas sans rappeler Edgar Allan Poe. A l'instar de Baudelaire qui a si bien su traduire Poe, Barbey d'Aurevilly avait cette capacité, lui aussi, de discerner, même dans le plus coloré des jardins sous l'éclatant soleil de juillet, la zone d'ombre où poussent les "fleurs du mal"...
C’est peut-être par amour de l'indicible, entre ombre et lumière, là où l'on ne sait plus très bien de quel côté du miroir nous nous trouvons, que j'ai toujours apprécié la littérature romantique et ses élans fantastiques. Et ce n'est sans doute pas un hasard si mes travaux ont été imprégnés par les gravures et eaux fortes qui illustraient les pages de ces romans. Dessinateur d'abord et aujourd'hui photographe, je suis resté attaché à ces ambiances et bien sûr au noir et blanc, un noir et blanc narratif, presque littéraire qui seul peut dire et raconter ce qui se passe au delà du réel, à la frontière des rêves.
En temps qu'auteur j'ai toujours été heureux lorsque, regardant mes photographies, les visiteurs de mes expositions faisaient référence à Barbey d'Aurevilly. Des témoignages sensibles qui touchaient juste, car il est bien évident qu'au delà de toute considération technique, c'est bien dans cette littérature ouverte sur l'imaginaire et l'émotion que mon travail photographique en noir et blanc prend sa source.
A l'occasion de cette exposition j'ai revisité certains lieux aurevilliens, un hommage au Cotentin que je ne me lasse pas de photographier, bien sûr, mais aussi et surtout un hommage à cet écrivain à la personnalité complexe et contrastée comme le noir et blanc que j'affectionne, lui qui à su transcender la part d'ombre de notre univers visible en l'éclairant de ses "Lumières Aurevilliennes".
Bruno Mercier - juin 2010
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